Jia - life is short. smile while you still got teeth.

Je suis née le 16 juillet, un jour de pluie comme il en arrive parfois en Australie. Mon papa et ma maman…

Non, je déconne.

Vous vous en foutez de comment je suis née, pas vrai ? Et je pense aussi que vous foutez aussi de savoir ce que mes parents pensaient de mon arrivée dans ce monde. On arrive tous de la même manière après tout, inutile de vous expliquer comment ça se passe vous le savez déjà. Et si vous ne le savez pas alors… Retournez à l’école, vos profs ont dû sauter un chapitre.

Bon à savoir par contre, c’est que ma mère était d’origine chinoise, tandis que mon père était un australien pure souche. Pas grand-chose à vous dire sur mon enfance non plus, pas plus passionnante que ma naissance. J’étais fille unique, tout allait bien entre mes parents, rien de remarquable à ma petite vie d’enfant ou en tout cas, rien que vous n’ayez besoin de savoir. Nous n’étions pas riches, mais pas pauvres non plus. La vie n’était pas rose tous les jours, mais ça n’était pas non plus la guerre à la maison. Tout allait bien. Jusqu’au jour où un incendie se déclara dans la petite maison où nous vivions en banlieue de Melbourne. J’en suis sortie vivante, quoique je porte encore aujourd’hui les cicatrices d’une vilaine brûlure dans le dos. Mes parents, eux, n’eurent pas cette chance. J’avais 9 ans, et pas de famille apte à me prendre en charge si bien que comme n’importe quelle gamine dans cette situation, c’est aux plus ou moins bons soins des services sociaux que j’ai fini.

Le problème, c’est que quand une gamine de 9 ans refuse de parler, reste renfermée dans son monde, il est difficile de lui trouver un foyer stable. J’ai été pas mal baladée de famille d’accueil en foyers, les familles chez qui j’étais placée finissant souvent par en avoir assez de mon côté renfermé. Les mois et les années passant j’ai fini par recommencer à parler, mais toujours le strict minimum, et qu’avec de rares privilégiés. En me voyant aujourd’hui, avec ma grande goule et mon sarcasme facile, vous ne vous en douteriez surement pas toutefois. Tout ça dura jusqu’au jour où je me retrouvais placée dans une famille chez qui vivaient déjà deux autres de jeunes qu’ils avaient pris sous leur aile, en plus de leur propre fils biologique. Des gens bien pour une fois, ça changeait un peu des familles qui sont là pour le fric qu’on peut leur rapporter et dans le meilleur des cas, vous ignorent royalement tant que vous ne leur cassez pas les pieds. Là-bas je me liais rapidement d’amitié avec l’un des autres jeunes, Chris. Un peu plus vieux que moi, lui vivait là-bas depuis plusieurs mois déjà et à son contact, de gamine renfermée je passai à adolescente pleine de vie. Et puis cette amitié évolua en un peu plus que cela…

Mais il n’est pas le seul à avoir marqué mon adolescence. Il y eu un autre gars et pauvre de moi, c’est sur moi qu’il avait choisi de jeter son dévolu. En y repensant avec un peu de recul, ça tournait davantage à l’obsession. Travis était le fils biologique de nos parents d’accueil, si bien que je n’osai jamais rien dire de peur de tout gâcher. Pour une fois que je me retrouvais dans une famille décente ! Plus le temps passait, plus il se faisait insistant, me mettait de plus en plus mal à l’aise. Des paroles, des regards, puis des gestes déplacés qui commençaient sérieusement à me faire flipper. Quand Chris le découvrit il était hors de lui, mais je parvins à le convaincre de ne rien faire. Vous ne serez sûrement pas surpris de découvrir que cela ne dura pas.

Chris, qui avait pris dix-huit ans et ne vivait plus avec nous, débarqua alors que l’autre cinglé se montrait un peu trop insistant, un peu trop entreprenant. La situation dégénéra rapidement en une bagarre dans laquelle j’ai bien entendu essayé de m’interposer éclata. Résultat des courses, je fini avec un bras dans le plâtre et quelques égratignures. Chris… Et bien Chris fini aux mains de la police pour avoir poignardé Travis qui lui, atterri à l’hôpital.

Sauf que Chris n’avait rien fait. C’était moi. Je ne sais même pas d’où est sorti le couteau. Un instant j’essayais de les séparer alors que la bagarre prenait de l’ampleur, celui d’après Travis pointait vers Chris la lame aiguisée d’un couteau.  Chris qui l’a désarmé tant bien que mal et dans la panique, j’ai ramassé le couteau. Mais Travis pris le dessus et je paniquai. J’ai agi à l’instinct, pour protéger la première personne avec qui je m’étais réellement liée depuis la mort de mes parents, ne pouvant supporter de le voir se faire battre à mort par ce taré, tout ça par ma faute. Chris s’est dénoncé avant même que j’ai pu dire quoi que ce soit aux forces de l’ordre et à son réveil, l’autre cinglé ne l’a pas contredit, bien trop heureux de voir celui qu’il voyait, dans son esprit tordu, comme un rival, allait finir derrière les barreaux. Chris n’était pas un mauvais garçon, mais son casier judiciaire n’était pas non plus vierge, ce qui n’arrangea pas son cas.

Pour ma part, il était hors de question que je retourne vivre sous le même toit que Travis. Qui sait ce qu’il aurait été capable de faire… Alors une nuit, j’ai rassemblé mes affaires, et je suis partie. Ma majorité approchait, mais je ne pouvais pas passer un jour de plus à là-bas à attendre le jour de ma libération, à supporter les regards accusateurs des parents, complètement aveugle au fait que leur fils était totalement dérangé.

Depuis ce jour là et bien… Je me débrouille. Je suis majeure, si bien que les services sociaux ne me posent plus de problèmes, mais avec aucun diplôme en poche on trouve difficilement du travail. Je me contente de petits boulots occasionnels, lorsque je parviens à en trouver. Je suis également une voleuse très adroite, ce qui se révèle utile quand le boulot vient à manquer, c’est-à-dire malheureusement trop souvent. Je suis actuellement à la rue mais très douée pour m’introduire dans des endroits où l’on ne m’a pas invitée, si bien que j’arrive toujours à trouver un toit à me mettre au dessus de la tête. Des appart’ et maisons inoccupées, ce n’est pas ce qui manque et pour le reste, on fait avec les moyens du bord. Ma vie est donc rythmée ainsi, entre trouver de petits boulots, de petits vols, chercher un toit et bien sûr, rendre visite à Chris…